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La Loi Travail ne doit pas entrer dans l’entreprise !

Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez rappelle que "2016 a été marquée

par la loi Travail et plusieurs mois de mobilisations syndicales contre ce texte. Il s’agit d’une loi régressive, consécutive à un déficit de concertation et de dialogue social". Il assure que le combat contre cette réforme est loin d’être fini : "La France a été pointée du doigt tant par l’Organisation internationale du travail (OIT) que par l’ONU et des recours juridiques sont sur le point d’être lancés en ce début d’année.

Catherine Perret, membre du bureau confédéral ajoute "Si tous les décrets d’application de la loi Travail ne sont pas encore sortis, le patronat est d’ores et déjà prêt dans certaines filières, comme la métallurgie, à négocier des reculs pour les salariés. Je pense en particulier à Renault, qui affiche pourtant des résultats en forte hausse. D’autres dénonciations de droits collectifs sont en cours, dans la filière du textile notamment sur les temps d’habillage et déshabillage. Sur le terrain juridique, nous sommes prêts avec Force ouvrière et la CFE-CGC, dès qu’un cas d’entreprise nous le permettra, à contester la constitutionnalité de la nouvelle définition du licenciement pour motif économique. Nous allons également chercher à obtenir la condamnation de l’Etat auprès de l’OIT", ajoute-t-elle.

Il y a des moyens pour mener cette lutte et de faire tomber des dispositions parmi les plus ravageuses. En effet, la loi El Khomri comporte de nombreuses dispositions contraires aux textes fondamentaux et aux textes internationaux qui lient l’État français. Essayons d’identifier ces articles de la loi.

Le principe de neutralité

La loi Travail (article L. 1321-2-1) prévoit que le règlement intérieur peut imposer aux salariés un principe de neutralité et peut restreindre le droit des salariés de manifester leurs convictions personnelles et ceci de façon très générale. En effet, le texte ne précise de quelles convictions il s’agit : religieuses, politiques, syndicales ou morales ?
La neutralité ne devrait pas être le principe en entreprise, et les salariés devraient pouvoir s’exprimer librement sachant que le Code du travail prévoit déjà des limites.
Dans l’entreprise privée, les salariés sont la partie subordonnée dans la relation avec l’employeur, et leur liberté d’expression doit donc être protégée.

Les accords de préservation et de développement de l’emploi

L’employeur peut depuis la loi Travail, conclure des accords d’entreprise avec des organisations syndicales, en l’absence de toutes difficultés économiques ou financières, consistant à demander aux salariés d’accepter des conditions de travail moins favorables, ou de renoncer à des droits.
Lorsqu’un accord de ce type est conclu, il peut prévoir des dispositions en contradiction avec le contrat de travail individuel. Dans ce cas, l’employeur doit demander à chaque salarié individuellement s’il accepte que son contrat soit modifié dans un sens moins favorable. Si le salarié refuse, l’employeur est en droit de le licencier pour un motif « spécifique » (article L2254-2), qui n’est ni un motif personnel (puisque le salarié n’a pas commis de faute, qu’il ne présente pas d’inaptitude ou d’insuffisance professionnelle) ni un motif économique (puisque l’entreprise ne connait pas de difficultés économiques ou financières).
La CGT conteste ce nouveau motif de licenciement, qui n’est justifié ni légalement, ni moralement et qui est contraire à la convention 158 de l’OIT.

L’adoption d’un accord collectif d’entreprise par référendum

En principe, un accord collectif doit être signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés (au premier tour des élections des titulaires au CE ou de la DUP ou à défaut des DP), quel que soit le nombre de votants (article L. 2232-12 modifié par la loi Travail). Si ce n’est pas le cas, depuis la loi Travail, l’accord peut tout de même être valide sous certaines conditions :
  Si les organisations syndicales représentatives qui ont signé l’accord avec l’employeur représentent plus de 30 % des suffrages, elles peuvent décider d’organiser un référendum ;
  A l’issu de ce référendum, si 50 % des salariés votants (et non 50 % des salariés de l’entreprise) se sont exprimés en faveur de l’accord, il est valablement conclu et applicable dans l’entreprise.
Le problème majeur de cette disposition, est que des syndicats minoritaires peuvent signer un accord, qui est ensuite adopté par une minorité de salariés dans l’entreprise en cas de fort abstentionnisme. Cet accord, qui peut être défavorable au salarié, n’a donc aucune légitimité.

La contestation par l’employeur
de l’expertise demandée par le CHSCT

La loi Travail (article L4614-13) a introduit la possibilité pour l’employeur de contester la décision du CHSCT d’avoir recours à un expert. Si le juge admet qu’il n’était pas nécessaire que l’expert soit consulté, alors l’employeur n’a pas à assumer les frais d’expertise. Dans ce cas l’expert ne peut pas être payé, puisque le CHSCT ne dispose pas d’un budget.
La CGT craint que cela pousse l’expert à ne commencer à travailler qu’une fois achevé le délai de 15 jours dont dispose l’employeur pour contester le recours à un expert. Cela risque d’entrainer des retards systématiques dans la consultation du CE et du CHSCT qui sont déjà soumis à des délais très stricts. La CGT craint également que certains CHSCT disposant de faibles budgets ne puissent plus recourir à des experts, alors même qu’une expertise serait justifiée, par peur de devoir assumer des frais qu’ils n’ont pas les moyens de payer.

Le CE et le CHSCT ne seraient alors plus à même de rendre un avis éclairé, alors qu’est en cause le respect des droits à la santé et la sécurité des salariés.

L’aménagement par accord du temps de travail

La loi Travail prévoit la possibilité pour un employeur de négocier un accord collectif ou une convention individuelle de forfait en jours ou en heures (Ordre public : article L3121-53 et suivants ; Négociation collective : article L3121-63 et -64 ; Disposition supplétives : L3121-65 et -66). La loi crée des obligations à la charge de l’employeur : vérifier que la charge de travail est raisonnable, que le temps de travail est bien réparti, s’assurer de l’articulation entre activité professionnelle et vie personnelle, de la rémunération et de l’organisation du travail dans l’entreprise, prévoir les modalités d’exercice du droit à la déconnexion... Ces obligations servent à garantir les droits des salariés, comme le droit au repos ou le droit à la santé.

Les dispositions du Code restent insuffisantes par rapport aux exigences des textes européens. En effet, la loi ne prévoit pas de procédure permettant de contrôler que l’employeur respecte bien ses obligations. La loi renvoie aux accords collectifs l’obligation de prévoir les procédures permettant de s’assurer de la bonne conduite de l’employeur. Or, il est possible que des accords défavorables soient conclus dans certaines entreprises, ou même des accords favorables mais ne prévoyant pas de garanties suffisantes. Dans ces cas-là, les droits au repos et à la santé des salariés sont en danger, puisque rien ne vient s’assurer que l’employeur respecte ses obligations.

De plus, la loi prévoit que certaines dispositions relatives au temps de travail maximal ne sont pas applicables et permet la renonciation du salarié à ses jours de repos, ce qui est de toute évidence contraire au droit au repos.
La loi Travail prévoit que les employeurs peuvent conclure des accords collectifs ou des conventions individuelles sur les forfaits aux conditions applicables avant l’adoption de la loi. Pour nous, il s’agit d’une rupture d’égalité entre les salariés. Il n’est pas justifiable que des salariés d’une même entreprise, exerçant le même emploi, soient soumis à des conditions de travail qui ne soient pas les mêmes : les accords en forfait devraient prévoir les mêmes conditions et garanties pour tous les salariés.

Le motif économique de licenciement

La loi Travail (article L1233-3) prévoit que les difficultés économiques peuvent être caractérisées par des indicateurs économiques (baisse des commandes, du chiffre d’affaire, de l’excédent brut d’exploitation) dont l’ampleur minimale varie en fonction du nombre de salariés de l’entreprise. Le fait de prévoir une définition de la cause économique réelle et sérieuse qui varie notamment en fonction des effectifs de l’entreprise institue selon nous une différence de traitement entre les salariés qui méconnaît le principe d’égalité devant la loi.

Encadrer les difficultés économiques dans des barèmes et des durées empêche le juge de contrôler le contexte du licenciement comme le préconise la convention 158 de l’OIT. Or, il est bien connu que les entreprises peuvent « jouer » avec ces indicateurs économiques, par exemple, une baisse de l’excédent brut d’exploitation peut se justifier par un gros investissement, ou même l’augmentation des revenus des dirigeants…

La CGT, en 2017, demande toujours l’abrogation de ce texte.

Article publié le 5 janvier 2017.


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